Sri Krishna Janmastami

Connue comme l’une des plus grandes fêtes religieuses de l’hindouisme, Sri Krishna Janmastami, ou
Krishna Jayanti, est célébrée par neuf cent trente millions d’hindous à travers le monde et
commémore l’apparition terrestre de Krishna. Décrit dans les textes sacrés des Védas comme Bhagavan, Le Dieu Un sans second, Krishna est également connu comme le Brahman doù tout émane mais aussi sous les noms affectueux de Gopal, Govinda, Madhava, Hari, Damodar, etc. qui sont tous autant de noms liés à ses divertissements variés. Sous ses traits uniques de Vishnu, Il se manifeste aussi dans l’infinité du cosmos en des formes multiples, nommées avatars, comme autant de bougies brûlant du même feu originel ayant servi à les allumer.

De nombreux occidentaux se contentent de restreindre Krishna à un simple personnage historique ou mythologique, ce qui est déjà bien supérieur au fait de l’ignorer ou carrément lui enlever la paternité d’une multitude d’enseignements védiques depuis la nuit des temps. Cela n’empêche en rien Krishna d’être immensément célèbre pour un certain nombre de raisons dont voici une liste non exhaustive des principales :
– Son insolite apparition terrestre, lui qui est souvent comparé à la lumière en plein milieu des ténèbres de la nuit, et ce dans une prison d’où il parvient à sortir avec son père Vasudev, qui le transfère à Vrindavan
– Sa maîtrise totale de l’illusion, dès son apparition et lors de ses 125 années de présence terrestre,
– Son incomparable beauté d’éternel jeune homme, au teint sombre comme un nuage chargé de pluie, à l’irrésistible sourire enchanteur, aux longs cheveux noirs bouclés ornés de plumes de paon, à la voix grave comme un grondement de tonnerre, et aux pieds comparés aux fleurs de lotus
– Son élégance naturelle, paré de vêtements semblables à l’éclair, portant régulièrement au cou des guirlandes de fleurs toujours fraîches, dont la douceur attire des abeilles surprises à fredonner des hymnes védiques
– Son expertise de joueur de flûte et de danseur talentueux qui excelle à faire chavirer les cœurs
– Ses actes surnaturels dès sa plus jeune enfance où il s’exerce aussi bien à tuer de puissants démons qu’à jouer avec ses amis
– Son sens aiguisé de stratège politique et militaire
– Son infinie douceur, chantée par les plus grands mystiques et poètes depuis des milliers d'années
– Son amour spirituel infini qu’il partage volontiers équitablement avec tous les êtres de la création, des plus faibles aux plus puissants
– Sa maîtrise complète des pouvoirs yogiques, les yoga-siddhis
– Sa sagesse au savoir insondable, lui, l’auteur incontestable des propos intemporels de la Bhagavad Gita qu’il énonce à son dévot Arjuna sur un champ de bataille, à l’orée d’une guerre fratricide
– …
Pour revenir à cette spectaculaire apparition de Krishna à Mathura il y a plus de cinquante siècles et qui est au cœur même des festivités de Janmastami, évoquons simplement la mise en scène complexe qui l’accompagne.
Krishna sort de la prison de Kamsha et est immédiatement transféré par Vasudev son père dans le proche village de Vrindavan, où il va grandir incognito dans la communauté des pâtres et au milieu des vaches.
Mais pourquoi cette prison ? C’est là que le roi Kamsha avait emprisonné sa propre sœur Devaki, le jour de son mariage avec Vasudev, après avoir entendu une voix venue du ciel lui annoncer que le huitième enfant de ce couple le tuerait.

Sa première réaction fut de vouloir tuer sa sœur sur-le-champ, mais Vasudev l’implora de n’en rien faire et lui promit de lui livrer tout enfant qui viendrait à naître. Kamsha accepte, par contre il les enferme tous deux dans sa prison pour être sûr de parfaitement contrôler la situation. Leurs 7 premiers enfants sont donc effectivement, chacun à son tour, livrés à Kamsha qui les tue tous systématiquement. Par contre l’arrivée du huitième se présente différemment. Vasudev et Devaki au fond de leur cellule reçoivent avec joie l’avènement d’une véritable apparition divine qui contraste entièrement avec les 7 naissances précédentes. Vishnu se présente devant eux en majesté avec ses quatre bras, puis se transforme aussitôt en Bébé Krishna, leur nouveau-né ; c’est alors qu’intervient la puissance mystique de Krishna qui envoûte les gardiens en les plongeant dans un profond sommeil tandis que les lourdes portes de la prison s’ouvrent brusquement. Sans perdre une seconde, Vasudev prend Bébé Krishna et le porte à travers la Yamuna, depuis Mathura jusqu’à Gokul, un hameau de la région de Vrindavan. Arrivé chez son demi-frère Nanda, il constate que son épouse Yashoda vient de mettre au monde une petite fille, une enfant qui n’est nulle autre que Subhadra également connue sous le nom de Yogamaya, l’énergie spirituelle du Seigneur. Grâce à la puissance mystique de Krishna, Yashoda et tous les autres habitants de la maison dorment profondément. Échangeant alors Bébé Krishna avec la fille qui vient de naître, Vasudev retourne à Mathura et reprend sa place dans la prison, enchaîné comme auparavant afin que personne ne remarque qu’il s’en était absenté. Lorsque Kamsha apprend que Devaki a accouché, il fait brutalement irruption dans la prison pour tuer le nourrisson. Dans une rage désespérée, il tente de l’écraser contre le sol de pierre. Mais la petite fille prend alors une forme effrayante à huit bras, celle de Mahamaya, Durga, la déesse des sphères matérielles.
« Imbécile ! » lui dit-elle, « Tu crois pouvoir me tuer, mais c’est impossible. Sache ceci, Kamsha : c’est trop tard, l’enfant qui causera ta perte est déjà né. »
Après ces terribles paroles Durga disparaît. Perturbé, nuit et jour, Kamsha fait appel à de nombreux démons et sorcières pour traquer Krishna et le tuer. Certains parviennent à le trouver à Vrindavan mais Krishna les anéantit facilement l'un après l'autre. Et bien plus tard Krishna adolescent et son frère Balaram feront un jour irruption à Mathura dans une arène où ils élimineront plusieurs autres
lutteurs redoutables avant d’en finir avec Kamsha lui-même, ce roi tyrannique devenu la honte de toute une dynastie.
L’un des noms de Krishna est Adhokshaja, celui qui est situé au-delà des sens matériels. Autant appréhender et voir la matière est facile pour les sens de l’être humain, autant il lui est difficile d’appréhender Krishna, dont la nature est 100 % spirituelle. Une vision spirituelle est en effet
nécessaire pour pouvoir comprendre Krishna et bien saisir ses propos dans la Bhagavad Gita. Il y affirme entre autres que Lui, le maître du temps et des univers, maintient un voile d’illusion, Maya, entre Lui et la majorité de ceux qui Le jalousent ou L’ignorent. Il ne se révèle qu’à ceux dont les yeux sont oints du baume de la dévotion, la bhakti.
La plupart des grands maîtres spirituels de l’Inde contemporaine s’accordent pour dire que Janmastami célèbre la victoire de la lumière sur les ténèbres, du bien sur le mal, et que ce festival rappelle l’emprisonnement de l’âme indestructible dans la prison du corps éphémère mais stimule parallèlement son éveil spirituel à travers l’ascèse, la dévotion et le savoir védique.
Synonyme de joie, l’apparition de Bébé Krishna nous invite à chérir l’innocence et le bonheur de l’enfance, à rester établi dans l’amour, le courage et le devoir, le dharma, pour faire face aux nombreux défis de la vie humaine.

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